Assouplissement de l’appréciation de l’intérêt à agir des associations contre une autorisation d’urbanisme
Le juge administratif apprécie l'intérêt d'une association à agir contre une autorisation d'urbanisme au regard des statuts de la requérante, en prenant en compte son champ d'action géographique (principe de proximité) et la nature des intérêts qu'elle défend (principe de spécialité).
Jusqu’à présent, afin de savoir si les termes de l'objet social d’une association étaient suffisamment précis et orientés vers l'objet du litige, le juge administratif exigeait que les statuts se réfèrent à la défense de l'urbanisme ou d'un site en particulier.
Dans l’arrêt commenté rendu le 20 octobre 2017, le Conseil d'État assouplit considérablement sa position.
En l'espèce, le permis de construire litigieux autorisait la réalisation de 3 habitations d'une surface de plancher globale de plus de 450 m² sur un terrain jusque-là non bâti. Le recours avait été engagé par l'association de défense de l'environnement et du cadre de vie du quartier qui, aux termes de ses statuts, avait pour objet « la mise en œuvre de tous les moyens disponibles pour la sauvegarde et l'amélioration du cadre de vie des habitants ».
Le tribunal administratif de Versailles avait écarté cette requête comme irrecevable, jugeant cet objet statutaire trop large et trop éloigné des considérations d'urbanisme. Saisi d'un pourvoi, le Conseil d'État censure cette décision après avoir estimé que « le projet autorisé, par sa nature, le nombre de constructions autorisées, le choix d'implantation retenu et la densification qu'il induisait, était susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants du quartier, dont l'association requérante avait pour objet d'assurer la sauvegarde ».
Ainsi, l'exigence d'un intérêt d'urbanisme expressément mentionné dans les statuts a disparu. La reconnaissance de l'intérêt à agir résulte en revanche d’une appréciation in concreto, à savoir un rapprochement entre l’objet social de l’association et le projet de construction, pris dans sa globalité.
Cette décision s’inscrit dans la ligne de fond suivie par la juridiction administrative depuis la réforme initiée par l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013 : le juge requiert du demandeur de démontrer ou infirmer l'existence in concreto d'un intérêt à agir (v. CE, 10 juin 2015, n° 386121, Brodelle et Gino).
Le requérant doit ainsi présenter une argumentation solide au titre de l’intérêt à agir. Ce sont les éléments produits au dossier au titre de la nature du projet, du nombre de constructions autorisées, du choix d'implantation retenu et de la densification qu'il induit qui permettent au juge administratif de considérer ou non qu’il est susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants inscrit dans les statuts associatifs.