Concession : légalité d’un critère relatif à des prestations supplémentaires non quantifiées et inapplicabilité du régime des offres anormalement basses
Le 26 février 2020, le Conseil d’Etat a rendu un nouvel arrêt en matière de passation d’un contrat de concession de mobilier urbain comprenant la mise à disposition, l'installation, la maintenance, l'entretien et l'exploitation commerciale d'abris voyageurs et de mobiliers urbains.
Le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la question de la qualification de ce type de contrat de mobilier urbain en concession de service (CE 25 mai 2018, Sté Philippe Védiaud Publicité, req.n°416825), l’intérêt de cet arrêt réside donc ailleurs.
D’une part, la Haute juridiction a jugé de la légalité d’un critère d’appréciation des offres relatif à des prestations supplémentaires.
En l’espèce, le règlement de la consultation prévoyait la possibilité pour l’acheteur public de commander des prestations supplémentaires en cours d’exécution. Ces prestations étaient évaluées au titre d’un critère d’appréciation du prix unitaire proposé par le candidat pondéré à 34% sans qu’aucune limite quantitative ne soit posée.
Saisi par la société évincée JCDecaux France, le juge du référé-précontractuel du tribunal administratif de Grenoble avait annulé la procédure de passation au motif que « l'absence de limite quantitative à ces prestations avait méconnu le principe de la définition préalable par l'autorité concédante de l'étendue de ses besoins et avait laissé à la commune une marge de choix discrétionnaire ».
Mais pour le Conseil d’Etat, lors de la procédure de mise en concurrence, l’acheteur public peut prévoir un critère des offres fondé sur la comparaison du prix unitaire proposé par les candidats pour des prestations supplémentaires lorsqu’il estime qu’il aura éventuellement la nécessité d’y recourir en cours d’exécution et quand bien même il ne pourrait pas en déterminer la quantité.
En l’espèce, un tableau « permettait de comparer les prix unitaires des différentes offres, et, au surplus, que les candidats admis à concourir étaient à même de demander des précisions sur ce point à l’autorité concédante s'ils l'estimaient souhaitable ».
Il censure donc pour erreur de droit le raisonnement du tribunal administratif.
D’autre part, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’inapplicabilité du régime des offres anormalement basses aux contrats de concessions.
Comme le souligne Gilles Pélissier, Rapporteur public, le Conseil d’Etat n’a jamais eu l’occasion de se « prononcer sur l’opérance et, dans l’affirmative, l’application, de la notion d’offre anormalement basse en matière de concessions ».
A l’occasion de cette affaire, il a donc jugé que « la prohibition des offres anormalement basses et le régime juridique relatif aux conditions dans lesquelles de telles offres peuvent être détectées et rejetées ne sont pas applicables, en tant que tels, aux concessions ».
Cette décision peut s’expliquer par la faible importance du prix versé par l’acheteur dans ce type de contrat puisque le titulaire est par définition soumis au risque d’exploitation. Il convient cependant de noter une nuance rédactionnelle, le Conseil d’Etat précisant que le régime des OAB n’est pas applicable « en tant que tel », sans d’autres précisions.
CE, 26 février 2020, Commune Saint-Julien-en-Genevois n° 436428