Du juge compétent pour connaître des litiges relatifs à l’exercice de servitudes conventionnelles établies sur le domaine public
L’article L. 2122-4 du code général de la propriété des personnes publiques autorise expressément la création de servitudes conventionnelles sur le domaine public, dans la mesure où leur existence est compatible avec l'affectation du bien sur lequel elles s'exercent.
Antérieurement au 1er juillet 2006, date d’entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, il n’était pas possible de conclure de servitude sur le domaine public. Pour autant, la jurisprudence admettait le maintien de servitudes conventionnelles si elles avaient été conclues avant l’incorporation du bien en cause dans le domaine public (CE, 26 février 2016, Syndicat des copropriétaires de l’immeuble « Le Mercure », n°383935).
La validité du maintien de ces servitudes est donc conditionnée au respect de la compatibilité avec l’affectation du bien sur lequel elles s’exercent, tout en étant assortie d’une exigence supplémentaire d’antériorité de la servitude sur l’incorporation du bien au domaine public, lorsque cette incorporation est elle aussi antérieure à l’entrée en vigueur du code.
Si le maintien des servitudes conventionnelles établies sur le domaine public antérieurement au 1er juillet 2006 est garanti, leur contentieux implique nécessairement la confortation de deux exigences contradictoires :
- D’une part, la nature privée de la convention, par définition antérieure à l’incorporation du bien sur lequel elle s’exerce au domaine public ;
- D’autre part, l’exclusivité de compétence garantie au juge administratif par les dispositions de l’article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques sur les autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public.
Il s’est donc posé au Tribunal des conflits la question de savoir si la compétence du juge administratif pour connaître de l'occupation ou de l'utilisation du domaine public pouvait s'étendre au contentieux de leur exercice d’une convention de droit privé.
Tout en reprenant à son compte les conditions de validité du maintien de telles servitudes conventionnelles (compatibilité avec l’affectation et antériorité de la servitude sur l’incorporation du bien au domaine public), le Tribunal a répondu par la négative, faisant ainsi prévaloir la nature de la convention sur celle du bien sur lequel elle s’exerce.
Ainsi, s’agissant d’une servitude de droit privé, le litige relatif à son exercice relève de la compétence des juridictions judiciaires.
Tribunal des Conflits, 5 juillet 2021, n° C4218, mentionné aux tables