Le cocontractant de l’administration qui, en raison de la notification tardive d’un ordre de service, sollicite une indemnisation est tenu de présenter un mémoire en réclamation
Le Grand port maritime de Marseille avait, par acte d’engagement du 3 décembre 2013, confié à la société Can les travaux de dragage d’entretien des postes d’attente fluviaux sur les bassins ouest de ce port. Le premier ordre de service étant intervenu le 21 juillet 2014, plus de 7 mois après la notification du marché, le titulaire en avait sollicité la résiliation conformément aux stipulations de l’article 46.2.1 du CCAG Travaux (reprises aujourd’hui à l’article 50.2.1 du CCAG dans sa version issue de l’arrêté du 30 mars 2021).
Ces stipulations permettent au titulaire de demander la résiliation de son marché si l’ordre de service de démarrage des travaux ne lui est pas notifié soit dans le délai fixé par le marché, soit dans le délai de six mois à compter de la notification du marché. L’administration ne peut pas refuser la résiliation.
Lorsque la résiliation est prononcée à raison de l’émission tardive d’un ordre de service, le titulaire dispose de la possibilité d’être indemnisé des frais et investissements éventuellement engagés pour le marché et nécessaires à son exécution. Il doit, à cet effet, présenter une demande écrite, dûment justifiée, dans le délai de deux mois, à compter de la notification de la décision de résiliation.
Le marché confié à la société Can ayant été résilié à raison de l’émission d’un ordre de service tardif, la société titulaire avait demandé l’indemnisation des frais et investissements qu’elle avait engagés pour le marché et nécessaires à son exécution. L’administration n’ayant pas fait droit à sa demande, le titulaire l’a présentée devant le Tribunal administratif.
Pour statuer sur la recevabilité de cette demande, le Conseil d’Etat expose d’une part, les stipulations déterminant la résiliation pour ordre de service tardif (c’est-à-dire, ce qu’est en droit de réclamer le titulaire du marché résilié) et, d’autre part, celles relatives à la procédure de règlement des différends et des litiges (c’est-à-dire la procédure à suivre si l’administration ne fait pas droit à sa demande).
Avec cet arrêt du 29 décembre 2022, le Conseil d’Etat rappelle qu’un différend ne peut se résoudre que par la présentation d’un mémoire en réclamation, le désaccord qui peut naître à l’occasion d’une demande d’indemnisation consécutive à une résiliation pour ordre de service tardif ne saurait déroger à cette règle générale.
La présentation d’un mémoire en réclamation est la règle générale s’agissant de la gestion d’un différend (peu importe le fondement ayant donné naissance à différend), la recevabilité de toute action contentieuse dépend toujours du respect de cette procédure préalable.
Les stipulations relatives à la résiliation pour ordre de service tardif ne permettent pas d’écarter la procédure de règlement des différends et des litiges. Il conviendra, en toute circonstance pour le titulaire, de veiller pour le règlement des différends, quels qu’ils soient, à la présentation d’un mémoire en réclamation.
Conseil d’Etat, 29 décembre 2022, Grand Port Maritime de Marseille, n°458678