Le recours Béziers II (reste) cantonné à la décision de résiliation
Par principe, le cocontractant de l’administration ne peut contester une mesure prise par l’administration en exécution du contrat qu’en sollicitant la réparation du préjudice que cette mesure lui a causé ; il ne peut en poursuivre l’annulation (CE, 24 novembre 1972, n° 84054, A). Par exception, ce cocontractant peut, « eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution », contester la validité d’une décision de résiliation dans le cadre d’une action en reprise des relations contractuelles (CE, 21 mars 2011, Béziers II, n° 304806, A).
Par la décision commentée, le Conseil d’Etat affirme (à nouveau) que l’exception au principe évoqué ne saurait concerner que la décision de résiliation.
En l’occurrence et après rejet de sa demande en première instance, le bénéficiaire d’une convention d’occupation temporaire du domaine publique portuaire avait sollicité et obtenu d’une cour administrative d’appel l’annulation de la décision par laquelle l’administration indiquait ne pouvoir renouveler cette convention.
Cette position est censurée par le Conseil d’Etat, qui rappelle le traitement de principe réservé aux mesures d’exécution d’un contrat pour exclure de l’exception prévue pour les décisions de résiliation celles de refus de renouvellement :
« […] Le juge du contrat ne peut, en principe, lorsqu'il est saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, que rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Cette exception relative aux décisions de résiliation ne s'étend pas aux décisions de la personne publique refusant de faire application de stipulations du contrat relatives à son renouvellement. Il s'agit alors de mesures d'exécution du contrat qui n'ont ni pour objet, ni pour effet de mettre unilatéralement un terme à une convention en cours. […] »
La décision commentée rejoint celles qui avaient estimé que ne peuvent que donner lieu à un contentieux indemnitaire les décisions prises par l’administration cocontractante :
- D’interrompre l’exécution d’une prestation prévue par un bon de commande (CE, 25 octobre 2013, n° 369806, B) ;
- De modifier unilatéralement le contrat (CE, 15 novembre 2017, n° 402794) ;
- De ne pas le reconduire (CE, 6 juin 2018, n° 411053, B) ;
- De ne pas le renouveler (CE, 21 novembre 2018, n° 419804, B).
Le recours Béziers II reste donc cantonné aux seules décisions de résilier le contrat, qui sont celles qui ont pour objet de mettre unilatéralement un terme à une convention en cours.
Conseil d’Etat, 13 juillet 2022, « Commune de Sanary-sur-Mer », n° 458488, B