La transformation de l’action publique par la loi ESSOC : « faire confiance et faire simple »!

La loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance  (dite ESSOC) met en place une série de mesures visant à favoriser un meilleur accompagnement des administrés et  renforcer l'efficacité de l'action publique. Elle comporte 2 piliers mis en avant dans la communication politique du gouvernement : « faire confiance » et « faire simple ».

Une relation de confiance avec l’administration

Droit à l'erreur  

Le « droit à l'erreur » est reconnu à la personne de bonne foi ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation. Cette personne ne pourra être sanctionnée par l’administration si elle procède à une régularisation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire dans un certain délai. Le « droit à l'erreur » ne pourra, toutefois, être invoqué en cas de méconnaissance de certaines règles (santé publique, sécurité des personnes et des biens, environnement, etc.) ou de stipulations contractuelles (CRPA, art. L. 123-1 et L. 123-2, créés par L. 10 août 2018, art. 2).

Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, il pourra en être ainsi en cas de méconnaissance de certaines obligations concernant le patrimoine historique : déclaration d’aliénation d’un immeuble ou d’un objet immobilier classé ou inscrit (C. patrim., art. L. 621-29-6 et L. 622-23) ou déclaration de déplacement d’un objet mobilier classé ou inscrit (C. patrim., art. L. 622-28). A l’inverse, le droit à l’erreur ne pourra être invoqué par un chef d’entreprise n’ayant pas effectué la déclaration préalable à l’embauche d’un nouveau salarié.

 

Droit au contrôle

Toujours dans le souci d’instaurer une relation de confiance entre le public et l’administration, le gouvernement a souhaité que le contrôle administratif ne soit plus conçu sous un angle exclusivement répressif, mais puisse aussi constituer une "aide à la mise en conformité". Le législateur reconnaît ainsi à toute personne le droit de demander à faire l’objet des contrôles qui peuvent lui être utiles puis d’opposer à l’administration les conclusions formelles de ce contrôle (CRPA, art. L. 124-1 et L. 124-2, créés par L. 10 août 2018, art. 2). Cette opposabilité est applicable aux contrôles engagés à compter du 11 août 2018 (L. 10 août 2018, art. 2, II).

 

Une action publique simple et efficace

 

La loi lance plusieurs expérimentations, au nombre desquelles :

  • la création d'un « rescrit juridictionnel », procédure permettant aux porteurs de projet de saisir un juge administratif pour qu’il se prononce sur la légalité externe d'un acte, afin de limiter le risque contentieux (L. 10 août 2018, art. 54)

  • la consécration du permis d'innover permettant de déroger aux règles de construction moyennant l’atteinte de résultats équivalents. Il sera mis en place par voie de deux ordonnances (L. 10 août 2018, art. 49) :

  • La première instaurera une autorisation à déroger sous réserve d'apporter la preuve de pouvoir atteindre des résultats équivalents à ceux prévus par les normes réglementaires.

  • La seconde organisera un véritable droit, pour les maîtres d’ouvrage, de choisir les moyens pour s’acquitter de leurs obligations, soit en appliquant les normes de référence définies à l’avance par le pouvoir réglementaire (ce qui vaudra alors présomption d’atteinte des résultats fixés par la loi), soit en démontrant, selon un mode de preuve prédéterminé, qu’ils ont réussi à atteindre des résultats équivalents en utilisant des techniques innovantes.

  • la mise en place d'un dispositif de médiation pour résoudre les litiges entre, d'une part, les entreprises et, d'autre part, les administrations et les établissements publics de l'État, les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale  (L. 10 août 2018, art. 36) ;

  • le remplacement de l'enquête publique par une procédure de participation du public par voie électronique pour les projets soumis à autorisation environnementale unique, lorsque ces projets auront déjà fait l’objet d’une concertation sous l’égide d’un garant (L. 10 août 2018, art. 56).

 

Une sécurité juridique renforcée pour les usagers

La loi adopte plusieurs mesures, parmi lesquelles :

  • le libre accès du public, par voie électronique, aux éléments d'information que détient l'administration sur les valeurs foncières déclarées à l'occasion des mutations intervenues au cours des 5 dernières années (LPF, art. L. 112 A, créé par L. 10 août 2018, art. 13). Cette mesure qui sera complétée par un décret en Conseil d'État, permet de donner une assise législative à l'application Patrim, accessible par le biais du site impots.gouv.fr.

  • la consécration légale de l'opposabilité au profit des administrés de la doctrine administrative, en permettant à toute personne de se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par une instruction ou une circulaire publiée (CRPA, art. L. 312-3, créé par L. 10 août 2018, art. 20) ;

  • l'extension du rescrit à de nouveaux domaines, dans des conditions qui seront précisées par un décret en Conseil d'Etat (L. 10 août 2018, art. 21, VIII).

    Il pourra notamment être recouru à cette procédure en matière de fiscalité de l'urbanisme (taxe d'aménagement, TCB-IDF et redevance d'archéologie préventive) pour les projets d'envergure (plus de 50 000 m2 ), le redevable ne pouvant présenter qu'une seule demande par projet.

  • l'expérimentation pour 4 ans, au sein de l'administration, d'un référent unique pour chaque usager afin de faciliter ses démarches (L. 10 août 2018, art. 29).

LOI n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance

 

Mercredi, 12 Septembre, 2018 - 15:14