Précisions sur le régime de la division primaire
Par une décision du 12 novembre dernier publiée au recueil Lebon, le Conseil d’Etat a mis fin à une période d’incertitude concernant l’instruction des demandes de permis de construire présentée dans le cadre d’une division primaire.
- L’appréciation de la légalité du projet.
La présentation d’une demande de permis de construire dans le cadre d’une division foncière implique de déterminer au préalable le terrain d’assiette du projet, celui qui sera pris en compte pour analyser la conformité du projet aux règles du PLU. S’agit-il seulement du terrain à détacher ou, au contraire, de l’ensemble du terrain d’origine ?
Si l’article R. 151-21 du Code de l’urbanisme précise la façon dont les règles des PLU sont appliquées pour les permis de construire valant division et lotissements, ces dispositions ne s’appliquent pas aux permis de construire dans le cadre de divisions primaires. Le Code de l’urbanisme reste silencieux à ce sujet.
De façon générale en droit de l’urbanisme, on retient que « l'assiette du permis de construire est constituée de l'ensemble des parcelles cadastrales d'un seul tenant appartenant à un même propriétaire »( CE 12 novembre 2020, n° 421590, Publié au recueil Lebon) L’administration s’est prononcée en faveur d’une transcription de cette acception ‘’globale’’ pour l’instruction des demandes de permis qui étaient présentées dans le cadre d’une division primaire : « À la date de la demande, cette unité foncière correspond à la propriété initiale, puisque la division n'a pas encore été effectuée »( CE 12 novembre 2020, n° 421590, Publié au recueil Lebon). Cette acception correspondait à la position qu’avait prise la Cour administrative d’appel de Versailles dans un arrêt du 29 mars 2007 (CE 12 novembre 2020, n° 421590, Publié au recueil Lebon) estimant que dans le cadre d’une division primaire, le respect des règles du PLU s’apprécie à l’échelle de l’ensemble de l’unité foncière.
Néanmoins, la Cour administrative d’appel de Lyon a retenu une solution contraire dans un arrêt du 12 novembre 2013 : la demande de permis de construire dans une division primaire ne devait porter que sur la partie de terrain à détacher (CAA de Lyon, 12 novembre 2013, n° 13LY00584).
Deux lectures semblaient ainsi s’opposer, correspondant à deux logiques antagonistes :
- une acception globale : la légalité du projet doit s’apprécier à l’échelle de l’ensemble de l’unité foncière (terrain d’origine). Cette démarche correspond à l’approche globale prévue par l’article R. 151-21 du code de l’urbanisme.
- une acception « opérationnelle » : en se plaçant au moment de la réalisation de la construction, après la division foncière, la légalité du projet doit s’apprécier à l’échelle du terrain résultant de la division à intervenir.
- L’intervention du Conseil d’Etat
Dans son arrêt du 12 novembre 2020, le Conseil d’Etat a fixé les modalités selon lesquelles les demandes de permis de construire présentées dans le cadre de divisions primaires doivent être instruites.
Il a posé le principe selon lequel la légalité du projet s’apprécie à l’échelle de l’ensemble de l’unité foncière : « Eu égard à l'objet de ce procédé permettant de combiner, pour les projets portant sur un groupe de bâtiments ou un immeuble autre qu'une maison individuelle destinés à occuper une partie de l'unité foncière existante, l'obtention de l'autorisation d'urbanisme nécessaire au projet et la division de l'unité foncière existante, le respect des règles d'urbanisme doit être apprécié au regard de l'ensemble de l'unité foncière existant à la date à laquelle l'administration statue sur la demande, bien que cette dernière soit informée de la division à venir ».
Les juges de cassation ont même anticipé l’hypothèse d’une modification du projet devant intervenir postérieurement à la division du terrain mais avant l’achèvement des travaux. Le cas échéant, la légalité du permis de construire modificatif devra toujours être examinée en considération du terrain d’origine, sans tenir compte de l’intervention de la division. Cette précision semble logique, mais elle est fort opportune : si le terrain d’assiette pris en compte avait été celui issu de la division, les règles du PLU se seraient appliquées différemment (deux terrains d’assiette différents) pour un même projet.
Cette décision a ainsi permis de clarifier une situation juridique auparavant incertaine, en définissant les modalités d’instruction des demandes de permis de construire présentées dans le cadre d’une division primaire.