Confirmation de l’absence d’obligation de mise en concurrence des titres d’occupation délivrés sur le domaine privé des personnes publiques
Le Conseil d’Etat met fin à l’incertitude qui planait sur l’obligation de mesures de mise en concurrence préalables à la délivrance par les personnes publiques d’une autorisation d’occupation sur des biens appartenant à leur domaine privé.
Depuis la jurisprudence européenne Promoimpresa SRL (CJUE 14 juill. 2016, aff. C-458/14), et l’ordonnance n°2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, qui s’est notamment traduite par la codification au sein du CGPPP (Code général de la propriété des personnes publiques) du principe général de l’obligation de mise en concurrence des titres d’occupation portant sur des biens relevant du domaine public des personnes publiques, un doute était né concernant une obligation similaire de mise en concurrence pour les titres d’occupation qui relèvent du domaine privé des personnes publiques. Une réponse ministérielle de 2019 (Rép. min. n° 12868, JOAN 29 janv. 2019) avait ainsi préconisé aux autorités gestionnaires du domaine privé de « mettre en œuvre des procédures similaires à celles qui prévalent pour le domaine public et qui sont précisées par les articles L. 2122-1-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques ».
Le Conseil d’Etat est venu, dans un arrêt du 2 décembre 2022, clarifier la situation juridique des biens appartenant au domaine privé des personnes publiques. Il indique que « si les dispositions de l’article 12 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006, transposées à l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques cité ci-dessus, impliquent des obligations de publicité et mise en concurrence préalablement à la délivrance d’autorisations d’occupation du domaine public permettant l’exercice d’une activité économique, ainsi que l’a jugé la Cour de justice de l’Union européenne par son arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa Srl (C-458/14 et C-67/15), il ne résulte ni des termes de cette directive ni de la jurisprudence de la Cour de justice que de telles obligations s’appliqueraient aux personnes publiques préalablement à la conclusion de baux portant sur des biens appartenant à leur domaine privé, qui ne constituent pas une autorisation pour l’accès à une activité de service ou à son exercice au sens du 6) de l’article 4 de cette même directive ».
Ainsi, le Conseil d’Etat distingue les cas dans lesquels la personne publique, en sa qualité d’autorité administrative, délivre une autorisation « pour l’accès à une activité de service ou à son exercice au sens de la directive », nécessitant dès lors une mise en concurrence, et les cas dans lesquels la collectivité « se comporte comme un opérateur ou bailleur privé, gérant son domaine privé sans prérogative particulière ».
En l’espèce, dans l’affaire qui lui était soumise, les requérants demandaient l’annulation de la délibération du conseil municipal de la Ville de Biarritz ayant autorisé le Maire à signer un bail emphytéotique portant sur l’Hôtel du Palais appartenant à la Commune, au motif qu’elle serait contraire à l’obligation de publicité et de mise en concurrence préalables à la délivrance d’une autorisation d’occupation du domaine public. Le Conseil d’Etat indique, qu’en jugeant que la conclusion de ce bail ne méconnaissait pas les dispositions de la directive européenne précitée, la Cour administrative d’appel de Bordeaux n’a pas commis d’erreur de droit et rejette le pourvoi.
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 02/12/2022, 460100, Publié au recueil Lebon