Passation d’une convention de délégation de service public, le Conseil d’Etat précise la portée de l’obligation d’information des conseillers municipaux
Au titre des délégations de service public, l’article L. 1411-7 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que : « Deux mois au moins après la saisine de la commission prévue à l’article L. 1411-5, l’assemblée délibérante se prononce sur le choix du délégataire et la convention de délégation de service public. Les documents sur lesquels se prononce l’assemblée délibérante doivent lui être transmis quinze jours au moins avant sa délibération »
Dans un arrêt rendu le 13 octobre 2023, le Conseil d’Etat apporte des précisions bienvenues sur la portée de cette obligation d’information.
Il ressort des faits de l’espèce que par une délibération du 22 juin 2017, le conseil municipal de Limoux a autorisé le maire à conclure une convention de délégation de service public pour la production et la distribution d’eau potable, qu’après la signature de la convention le 18 juillet 2017, un conseiller municipal d’opposition et un collectif local ont introduit un recours en annulation au motif pour l’élu d’une violation de l’article L. 1411-7 du CGCT précité, en ce que le maire ne lui a pas adressé le projet de délégation de service public au moins 15 jours avant le vote de l’assemblée délibérante l’autorisant à signer.
Déboutés en première instance et en appel, les requérants se pourvoient alors en cassation.
Dans sa décision, le Conseil d’Etat constate d’abord une erreur de droit de la juridiction d’appel qui s’est bornée à relever que le défaut d’information du conseiller municipal au moins 15 jours avant la délibération litigieuse du conseil municipal, n’avait pas eu d’incidence sur le sens du vote, sans rechercher si ce vice de procédure avait privé l’élu d’une garantie. Or, suivant la jurisprudence Danthony, les hauts magistrats soulignent que, « l’information adéquate de l’ensemble des membres d’une assemblée délibérante, afin qu’ils puissent exercer utilement leur mandat, constitue, en principe, une garantie pour les intéressés ».
Si tout conseiller municipal doit donc être informé des projets de convention de délégation de service public dans les conditions prescrites par l’article L. 1411-7 du CGCT, la Haute juridiction précise toutefois que cette garantie n’emporte pas obligation pour le maire de notifier ces mêmes pièces à chacun des membres du conseil municipal :
« (…)Toutefois, ainsi qu’il a été dit au point 6, le maire n’était pas tenu de notifier le projet de contrat aux conseillers municipaux mais seulement de les mettre à même, par une information appropriée, de le consulter quinze jours avant la délibération. Il suit de là que ce moyen d’appel était inopérant. (…) »
Ainsi, le Conseil d’Etat applique à la passation des délégations de service public les principes de l’arrêt Commune de Mandelieu-la-Napoule de 2012 dans lequel il s’était prononcé sur les contours de l’obligation d’information des conseillers municipaux par les maires de communes de plus de 3 500 habitants, en vertu de l’article L.2121-12 du CGCT. En effet, il est prévu l’envoi à chaque conseiller municipal lors de la convocation à une réunion du conseil municipal d’une note explicative de synthèse portant sur les questions inscrites à l’ordre du jour. Ainsi, selon l’arrêt d 2012, cette obligation doit être adaptée à la nature et à l’importance des affaires et il n’est pas nécessaire que ces documents représentent une justification détaillée du bien-fondé des propositions sur lesquelles les conseillers municipaux sont appelés à se prononcer, cette information suffisante pouvant être satisfaite avec le simple envoi des documents considérés.
Dans l’arrêt du 13 octobre 2023, le Conseil d’Etat retient donc que la faculté pour les conseillers municipaux de consulter le projet de convention constitue une information adaptée et qu’un envoi préalable du document n’était pas nécessaire.